Avant la sortie

Avant la Sortie : Entretien avec Xaviiiier autour de The Caravan

Alors, vous je ne sais pas, mais de mon côté, j’aime bien me mettre un petit disque pour me donner des idées de scénarios… Une ambiance (parfois juste un couplet) peut amener des choses auxquelles on n’aurait pas forcément pensé en réfléchissant juste sur la base d’un jeu. Ce matin, j’ai donc refermé le couvercle de ma platine sur un petit King Crimson¹ et attendu les premières notes de Cirkus (de l’album Lizard sorti en 1970).
Grosse ambiance alternant entre riff apocalyptique et passages folk poussant à l’optimisme, ça sent le scénar bien barré (et je ne parle pas du reste de l’album… Rhaaaa Lovely, Happy Family…).
Donc, ça va décaper un minimum, il me faut un jeu proposant une touche de naïveté ainsi qu’un fond si possible bien glauque pour coller à tout ça.
Hmmmmm, je contemple mes étagères en quête de l’univers qui s’y prêtera le mieux, hésite quelques instants sur Thanatos, mais me dis rapidement que je serais bien en peine d’y insérer la touche de naïveté ou d’optimisme requise par la musique. Damned !
Et là, je repense à un jeu indépendant (tout comme Thanatos d’ailleurs) en développement qui pourrait bien coller, The Caravan.
Une troupe d’enfants, une Matriarche mystérieuse, une terre hostile abritant des communautés à problèmes et des masques magiques transformant les dits enfants en créatures difformes… Parfait.
Seul problème, le jeu n’est pas encore sorti.
Qu’à cela ne tienne ! Je me saisi vaillamment de mon clavier et part débusquer Xaviiiier, l’auteur du jeu pour en savoir un peu plus et voir si effectivement, je pourrai recycler mon King Crimson dans son univers.

Quand même, quel album !!!

Salut Xaviiiier et merci de prendre quelques minutes de ton temps pour m’aider à solutionner mon problème de bande son.
Avec The Caravan, tu nous proposes donc un univers Dark Fantasy Poétique dans lequel vont évoluer des enfants (de 5 à 16 ans), sous l’égide d’une entité nommée la Mama, leur fournissant à la fois un cadre de vie (la caravane), des objectifs (“aider” des gens en échange de faveurs) et des pouvoirs magiques, par le biais de masques… J’ai bon ?

[Une petite musique gitane en arrière-plan, quelques roulottes et un grand feu où des enfants insouciants ne semblent pas prêter attention à quelques loups qui les observent]

Oui tu as bien cerné le décor posé de mon jeu the Caravan.
Pour compléter ton introduction du jeu, j’ajouterai qu’il n’y a que des enfants au sein de la caravane. Le plus grand, Micky fait office de chef.
Les aventures prennent place sur une île nommée l’Ile Crâne.

L’Île Crane

L’île se compose principalement de petits villages qui vivent reclus sur eux même autour d’une croyance ou une peur. Par exemple : un village appelé l’Échelle qui est construit, adossé à de grands arbres. Les habitants les plus importants vivent en hauteur. La nuit des rongeurs, plus grands que natures, plus féroces, viennent voler, attaquer les maisons du bas. Quand la caravane se pose non loin du village, la situation est désespérée. Un vieil homme est prêt à faire la Demande aux Chuchoteurs (la forme monstrueuse des enfants) pour sauver son village. Et il sait qu’en contrepartie il devra offrir un Don à la hauteur de sa Demande.
Mais attention tout n’est pas toujours blanc ou noir dans the Caravan. Le Don ne sera-t-il pas pire que le problème en fin de compte ?

[Zoom arrière du village pour laisser voir l’île dans sa grandeur générale. Quelques villes importantes apparaissent]

Voilà pour les villages, mais il existe aussi quelques villes importantes. Par exemple le Palais qui peut-être considéré comme la capitale. Là-bas un homme, qui se fait appeler le Prince, veut se positionner comme seigneur de l’Île.

Puisque personne n’a rien contre les évidences, je poursuis : Le Palais

Le Palais est une ville qui date de l’avant Grand Chamboulement. A cette époque la magie était maîtrisée (plus maintenant sauf à travers des artefacts). Les habitations sont construites en pierres qui ne subissent pas les affres du temps. La nuit, une lueur bleue émane des pierres pour éclairer les rues. Le Prince a imposé sa légitimité par la force et les savants qu’il embauche pour essayer de comprendre l’ancienne magie. A côté de lui, un Chuchoteur qui le protège…
J’arrête là, car je pourrais en parler des heures……
Voilà un peu l’ambiance générale du monde.

Alors d’un côté nous avons l’univers, et de l’autre le système de jeu. Je fais partie de l’école “qui fuit les systèmes génériques”, notamment quand un univers avec une forte identité doit prendre vie. Tu te positionnes comment par rapport à ça ? Et fatalement, tu es parti sur quel type de système ?

Déjà j’adore les systèmes de jeu. Pour moi un jeu de rôle, c’est :
– un univers
– une ambiance
– un système
– une feuille de perso
Je suis donc d’accord sur l’idée qu’un système générique rend fade les jeux. Après, en fonction de la proposition de jeu, il peut y avoir des systèmes plus ou moins complexes, plus ou moins simulationnistes … etc

Veuillez remplacer la cartouche Y pour pousuivre l’impression

The Caravan est un jeu d’émotions, de ressentis, de réactions d’enfants sous forme de monstres puissants. Je voulais un système plutôt simple, mettant en avant la différence entre enfants, adultes et Chuchoteurs. Pour être complet, la première version avait un système d10 à base de bonus, malus, compétences, pouvoirs… impossible à équilibrer, rendant trop complexe le nombre de compétences. Et je ne parle pas des pouvoirs qui apportaient pleins d’incohérences… brefs pleins de tests nuls et des calculs excels dans tous les sens.
Et je suis tombé sur la traduction du Grümph² de Cthulhu Dark³.

#balancetonpoulpe

J’ai adoré. Simple, rapide et un potentiel de hack assez facile.
Voilà j’avais ma base. Après 5 ou 6 parties playtests et beaucoup de débriefing, le système a été adapté à la version actuelle.
L’idée première est de faire ressentir que sous sa forme de Chuchoteur, l’enfant est très fort. Un monstre de 2m50 avec 6 tentacules peut affronter 4 ou 5 humains sans difficultés. Pas immortel, il peut se faire déborder, mais les Chuchoteurs sont forts et craints. Le cœur du jeu est de jouer des enfants monstres essayant d’aider les villageois contre quelque chose ou… eux-mêmes. La fourberie des adultes ou la fatalité de la vie ne se déjouent pas avec la force brute, mais par les yeux de la naïveté ou la voix d’un enfant qui essaie de se faire entendre.
En playtest j’ai toujours eu des retours sur le besoin de ne pas mécaniser les actions. 
Dixit par exemple : « bah j’ai des ailes pourquoi je dois faire un jet pour voler sur le toit », « j’ai 4 bras et je fais 2m50,  je veux pouvoir tenir 4 villageois en même temps », « je peux parler aux morts, tu m’autorises à transmettre un message au père de la petite fille ? »… Ah voila la poésie qui prend place… et là c’est trop bête de bloquer ça.

Ha oui, effectivement, des enfants monstres

Donc une des spécificités des pouvoirs dans Caravan : c’est qu’ils réussissent toujours. Par contre, pour apporter une tension, un jet Mystique est fait, pour piocher en cas d’échec dans une jauge.
Le risque de perdre du Mystique augmente avec la diminution de la jauge. (bon, c’est plus clair dans le livre).
Pour revenir au sujet. Il y a des règles qui vont mécaniser des éléments de jeu comme : la magie, la cruauté des actions des joueurs, la quantité d’adversaires, tout en laissant les idées des joueurs se réaliser.

Mon premier réflexe quand je lis Dark Fantasy est en général de me dire “Encore…”.
Alors, ce n’est pas que j’aie une dent contre le genre hein, mais le désespoir au bout d’un moment, comment dire… Du coup, j’ai trouvé plutôt malin de ta part de mettre en scène des enfants, ça nous évitera le côté “tout est foutu no futur gothisant”, même si la fatalité n’est jamais bien loin (oui oui je sais, Remi sans famille⁴ met en scène un enfant…). C’était pleinement intentionnel dès le début, cette opposition entre environnement impitoyable et fraîcheur de l’enfance ou c’est venu plus tard dans ton processus de création ?

Oui, c’était présent dès les premières lignes d’écriture et de playtest. Je crée mes jeux, mes campagnes ou mes scenarios toujours autour d’idées de scènes. Mon inspiration débute toujours par l’envie de voir, de faire vivre quelque chose à mes joueurs. Viennent après l’univers, le lore, le pourquoi du comment.
Pour Caravan, ma première idée a été : que feraient des joueurs sous forme de monstres en remontant une rue déserte de nuit dans un petit village. J’imaginais leurs voix stridentes qui chuchoteraient des choses incompréhensibles aux habitants terrés chez eux, terrifiés.
Le nom Chuchoteur est venu tout de suite.
Jouer uniquement un monstre était sans intérêt pour plusieurs scenarios. Il fallait plutôt aider les villageois apeurés.  De même des monstres contre des adultes ne m’emballaient pas.
Et voilà le combo était donc: Chuchoteurs/monstres/enfants contre villageois effrayés/adultes
Au premier playtest, de suite, les joueurs ont apporté de la poésie avec la vision des enfants.
Donc pour revenir à la question initiale. Oui tout de suite il y a eut la poésie et des enfants à travers des monstres.
Le vrai travail de création et d’écriture vient après pour étoffer, créer tous les éléments autour et le lore global.

Puisqu’on est parti sur la création, j’ai parcouru la plaquette de ton jeu  et me suis fait la réflexion suivante : “mais mais mais, il fait tout tout seul ?”
Tu confirmes ?


Oui je suis seul pour tous les postes : écriture,  illustration et mise en page.
J’adore toucher à  tout. J’adore découvrir, apprendre et là je suis servi.


Aujourd’hui, j’ai délégué uniquement la relecture et la correction à une autre personne (@edenroliste).
Par contre, je discute beaucoup, sur tous les aspects du jeu. J’ai énormément de retours, débriefing de parties. Sans ces échanges clés, le lore serait beaucoup moins développé. Merci à eux pour toutes ces heures d’échanges, de tests sur tous les éléments qui structurent le jeu et l’univers.
Par exemple, j’ai eu des échanges de 3 ou 4 heures juste pour définir l’âge des enfants que vont interpréter les joueurs : Pas trop jeune pour pouvoir enquêter, raisonner, mais pas trop vieux pour conserver une vision parfois naïve.

Les visuels de la maquette que tu m’as fourni m’ont tout de suite fait penser à Mork Borg, avec des couleurs flashy et une rencontre improbable (encore que pas tant que ça quand on y réfléchit bien) entre Punk et O.S.R… Tu oserais me dire que “Non Non, pas du tout” ou c’est une influence assumée ?

Euhhhh oui clairement Mork Borg a été la révélation.
Avant, pour moi un jdr devait faire 400 pages et décrire toutes les tavernes, toutes les rues, toutes les villes…. La mise en page était sur 2 ou 3 colonnes, avec une image toutes les 3 pages.


Et il y a eu 2 jeux : Mork Borg et Maze of the Blue Medusa⁵.
Une claque. Voila : poésie, jeu de role A5 sur 96 pages, c’est possible. En plus les univers, quoique non complets sont inspirants, mais tout est là.
Donc oui influence majeure et non pas un Mork Borg like.
J’avoue, le jaune est un peu copié, à moins que ce ne soit le jaune des teletubbies⁶ qui m’ait inspiré ….  je ne sais plus.

De l’idée de départ à la réalisation de la maquette, en passant par les illustrations et le game design, ça n’a pas dû se faire en quinze jours. C’était quoi pour toi le plus compliqué à mettre en œuvre ? Tu as eu des phases où tu t’es dis “pffffff… ça saoul, je plaque tout et je me barre à Plougastel manger des crêpes… heuuu… des galettes” ?

C’est par palier. Avant chaque passage de palier, c’est toujours « pfffff j’arrête, c’est nul ». Et puis, à un moment, il y a un truc, une inspiration, une phrase de quelqu’un qui permet de passer la marche.

Le fameux restaurant « le Tape Cul » à Plougastel, haut lieux de villégiature réputé auprès de tous les auteurs en plein burn out…

J’ai vite lancé des playtests qui étaient supers inspirants.
J’ai eu beaucoup de mal pour trouver mon style de mise en page. Je suis passé par 3 tests de 30 à  40 pages chaque fois pour me dire … « pfff c’est nul, c’est pas ça que je veux ». Et au troisième c’était bon.
Voila le style de palier difficile à franchir.
Là, actuellement, le corebook et le storybook sont écris, illustrés et mis en page a 80%. Le pfff actuel, c’est monter le financement et le marketing… ahhh c’est trop long… mais ça avance.

Mais dîtes voir un peu, ça m’a l’air chouette tout ça

Tu as dû acquérir des compétences particulières au long de ton processus de création, ou tu avais déjà les connaissances nécessaires de par ton parcours (pro ou autre) ?

Oui je connaissais un peu la création d’ebook, la mise en page et le dessin sur ordinateur. Mais par contre jamais aussi loin. Dans mes créations précédentes, il y avait 20% écrit et 80% dans ma tête. 
Là, il faut 100% écrit pour un lecteur qu’on ne verra jamais.

Bon, pis le choix de l’indépendance, tu y es venu comment ? Parce qu’il y a tout de même un certain confort à bénéficier des conseils et du soutien d’un éditeur…

Haaaa l’indépendance…

Je suis de nature à faire les choses seul. J’aime être entouré de conseils, mais avec une finalisation plutôt personnelle.
Je reconnais qu’un éditeur apporte 1000 conseils que je n’aurai jamais en travaillant seul. Mais aujourd’hui pour mon premier financement participatif, je préfère partir presque seul.
De nos jours avec internet, tout est possible seul. Les outils sont disponibles, l’impression à la demande accessible… etc…

Tu vas donc passer par un Financement participatif pour financer ton projet d’ici quelques mois. Tu nous détaillerais un petit peu en quoi va consister la gamme ?

Oui, d’ici à 3 à 6 mois, je lance le financement participatif sur Game On Tabletop⁷. Aujourd’hui, je suis prêt, mais l’installation du financement consomme beaucoup temps, beaucoup plus que je ne le pensais.
En termes de contenus, il y aura principalement 5 contreparties, en pdf et/ou en physique :
– un Corebook avec l’univers, les règles et 1 scénario.
– un Storybook de 8 scénarios avec toutes sortes d’approches possibles du jeu.
– Ecran A5 en 4 volets
– Des fiches A6 avec les différents masques pour la cérémonie.

De quoi s’équiper sous tous les formats

Pour la surprise, il y aura aussi ​quelques packs premiums avec un vrai masque de plus de 50​ ​cm​ ​….
Un vrai boulot que je n’imaginais pas. Mais ça avance​ peu à peu…..​

Tu as fais le choix de te lancer dans l’édition avec ce premier jeu. Ce n’est pas rien en plein Covid/pénurie de papier/crise des transports. Ça m’amène à m’interroger… C’est du one shot ou tu as d’autres projets que tu aimerais porter par la suite (qu’il s’agisse des tiens ou de ceux d’autres créatifs) ? 

– Dis Maurice, y’a plus d’papier… Elles sont où les ramettes ?
– Ch’ai pas… t’as regardé derrière les cartouches d’encre ?
– Ha… Ben y’en n’a plus non plus !!!

Oui toujours beaucoup de projets. Autour de Caravan il y aura une campagne et les explications de certains mystères des corebook et storybook.
Pour les autres jeux, j’ai constamment pleins d’idées, mais rien de fixe. Aujourd’hui, je mets toute mon énergie dans ce projet.
Mais c’est vrai qu’en découvrant et jouant à Maze of the Blue Medusa, j’ai découvert une vraie poésie créatrice dans un méga donjon.
Peut-être une idée pour un futur projet, pourquoi pas 🙂
Pour suivre l’avancé du projet une seule adresse : https://twitter.com/thecaravan8 

​​Un grand merci à toi pour ce zoom sur the Caravan et n’hésitez pas à me contacter sur twitter pour plus d’infos ou participer à des playtests.

Et voilà pour ce qui concerne The Cravan.
Xaviiiier me signale fort à propos que le jeu sera en financement sur Game On Tabletop du 2 au 30 avril, donc si comme moi vous avez des morceaux à utiliser en partie qui peinent à trouver un jeu dont l’ambiance colle, n’hésitez pas. Vous noterez également que Xaviiiier a fort habilement évité de me dire si mon King Crimson pouvait faire l’affaire… soit il est trop gentil pour me dire franco que je suis à côté de la plaque avec ma musique de vieux, soit c’est tellement une évidence que ça ne vaut pas vraiment le coup d’y prèter attention. Dans tous les cas, j’ai décidé en mon âme et conscience que j’ouvrirais ma première partie de The Caravan avec (et toc).
Rendez-vous est pris donc pour le 02 avril pour découvrir tout cela plus avant.

Et comme nous avons commencé en musique, il parait juste de terminer à l’avenant. Par conséquent, le dernier mot sera pour Freddy dans sa complainte à Mama

Is this the real life?
Is this just fantasy?
Caught in a landside,
No escape from reality
Open your eyes,
Look up to the skies and see,
I’m just a poor boy, I need no sympathy,
Because I’m easy come, easy go,
Little high, little low,
Any way the wind blows doesn’t really matter to me, to me

Propos de Xaviiiier recueillis par David Barthélémy

Notes et références :

¹ King Crimson
² John Grümph
³ Cthulhu Dark
Rémi sans famille
Maze of the Blue Medusa
Teletubbies
Game On Tabletop

Retour de lecture

Ce que j’en pense : Mork Borg

La forme :

Petit bouquin au format A5 de 90 pages (72 en papier glacé et les 18 du dernier cahier de type papier recyclé à fort grammage) , reliure cousue et signet en tissu pour ne pas se perdre.
Couverture texturée du plus bel effet et incrustation de caractères phosphorescents sur le dos du livre histoire de bien ressortir nocturnement sur vos étagères 🤩
À priori, c’est du solide qui va durer longtemps (quel apaisement pour le lecteur que de ne pas entendre de craquements à l’ouverture 😇), et tant mieux.
Tant mieux car il faudra un petit moment et de nombreuses lectures pour faire le tour de la maquette… Comment dire… Il n’y a pas deux pages identiques, que ce soit en terme de polices, de colonnes, d’alignement, d’illustrations, de… Tout.
Petit, jaune, différent (Nuprin™)
Aucun espace perdu, les pages de garde comportent (au début) une table de noms nordiques, des tables aléatoires de trésors, de pièges, de météo, de trouvailles en cas de pillage de cadavres et (à la fin) un récapitulatif des règles ainsi qu’un index.
Nous avons donc un prétendant sérieux au titre de maquette de l’année (ou pas, si vous appréciez les choses très carrées et unies) dans la catégorie Punko/Gothico/Hardcore/Doom/Métal/Fantasy sous acides, avec des tons jaune flashy, rose piquant, noir et argent (guettez les photos).
Les infos sont biens organisées, avec 16 pages de présentation de l’univers (de sa genèse à son inéluctable chute), 40 pages de règles (équipement, création de perso, résolution des actions, classes de personnages et règles optionnelles), 14 pages de bestiaire présentant toutes sortes d’antagonistes, tous plus barrés les uns que les autres, et pour finir, un donjon sur 18 pages pour jeter vos aventuriers dans le bain.

Rhooo, le vilain Basilique

Le Fond :

Mork Borg propose de jouer des aventuriers dans un monde agonisant et désespéré, tout ça par la faute d’un Basilique bicéphale dont l’une des têtes a proféré toute une série de prophéties, toutes avérées à ce jour et dont la dernière concerne l’apocalypse, la fin du monde dans des Ténèbres dévorantes et impitoyables.
Vous l’aurez compris, c’est la fête 😅
Vos joueurs seront donc amenés à évoluer dans un contexte globalement pourri et corrompu, que ce soit en la plus grande cité du monde, Galgenbeck, abritant la cathédrale du culte du Basilique bicéphale et dominée par Josilfa, archiprêtresse rendue immortelle par Nechrubel (en gros le dieu des Ténèbres qui aurait glissé les prophecies à l’oreille du Basilique) lui même, ou encore Schleswig, citadelle du roi tyran paranoïaque Fathmu IX (qui rendu fou d’angoisse par les prophéties s’est lancé dans une impitoyable quête de domination du monde), en passant par Grift, une ville-état péninsulaire uniquement reliée au continent par trois ponts cyclopéens enjambant un gouffre profond d’un millier de mètres, au fond duquel bouillonnent les eaux sombres de la Mer Sans Fin dans un déchaînement cataclysmique…


Bon, mes phrases à rallonge au champs lexical assez sombre vous auront sans doute laissé entrevoir la teinte « Dark métal » qui caractérise le jeu, et dans le cas contraire, les titres aux polices globalement illisibles devraient vous donner un solide indice thématique 😅.
De ce que j’en ai vu pour l’instant, on est positionné sur du jeu type osr (old school renaissance¹ pour ceux qui auraient un doute, à savoir du vieux dd dans l’ambiance, avec des aménagements plutôt modernes pour certaines règles), donc très orienté Donjon.
On note toutefois que le background fourni encourage largement à explorer d’autre types de scénarios (je l’écris comme ça, sinon on va me taxer de pédanterie avec l’usage de scénarii 😅) et d’aller bien au delà du simple pmt (porte/monstre/trésor…ou plutôt ici porte piégée, monstre dégueulasse et trésor maudit 😁).
Pour renforcer l’ambiance de fin du monde, nous avons en début d’ouvrage une liste de prophéties (disons, de « plaies » pour rester raccord) que le mj distillera mécaniquement sur un tirage de dés à chaque couché de soleil en jeu (suivant l’imminence souhaitée pour l’apocalypse, on tirera 1 d100/d20/d10/d6/D2 et sur un résultat de 01, on lance un d66 pour déclencher un évènement). Une fois les prophéties toutes réalisées (ou un certain nombre à définir, je n’ai pas vu de précisions à ce sujet), la fin arrive et Nechrubel engloutit le monde dans les Ténèbres.
Vos joueurs auront donc le choix entre reconnaître l’inéluctabilité des prophéties et chercher à tirer leur épingle du jeu tant que le monde durera ou au contraire tout faire pour les empêcher d’arriver (et à priori échouer 😂).

L’horloge de l’Apocalypse

Les Règles :

Alors pour cette partie, nous sommes sur du simple/efficace.
Une base de d20 + bonus/malus de caractéristique contre un seuil de difficulté échelonné de 6 (incroyablement simple) à 18 (ne devrait pas être possible), la moyenne étant située à 12.
Les 4 caractéristiques définissant les personnages sont donc :
Agilité
Présence
Force
Résistance
À la création, elle sont tirées au dés (il y a plusieurs méthodes possibles et l’option des classes de personnage en ajoute encore) et échelonnées entre 3 et 18, procurant des bonus/malus allant de -3 à +3.
Dès le personnage terminé, on ne conserve que les modificateurs, les scores initiaux (donc ceux entre 3 et 18) ne servant plus en jeu.
Nous aurons ensuite des talents de classe (si l’option est utilisée) permettant des effets spéciaux par rapport aux règles de base, la magie (qui se pratique exclusivement par l’usage de parchemins, découpés en deux catégories, les parchemins impies et les parchemins sacrés ) de type Vancien², osr oblige, avec donc un certain nombre d’usages par jour, usages déterminés aléatoirement chaque matin par un jet de D4+ Présence (bonus/malus) utilisations.
Pour utiliser ensuite le pouvoir d’un parchemin, on teste la Présence, seuil de 12. Si réussit, on perd un usage et le sort est lancé. En cas d’échec, on perds 2 points de vie et on souffre d’étourdissement pendant deux heures, sans plus pouvoir utiliser de parchemin pendant ce temps.
Pour ce qui est du combat, l’initiative est déterminée par groupe, PJ vs PNJ au d6… de 1 à 3 les PNJ agissent, de 4 à 6 se sont les PJ.
Il est à noter que le MJ ne jette pas les dés durant un combat, les joueurs font un test d’attaque et un test de défense si besoin. En cas d’échec, ils prennent des dégâts.

Quand je vous dis que c’est simple !

Le monde étant dur et profondément injuste, on peut également noter que lorsque l’on gagne de l’expérience, les points de vies peuvent augmenter et l’on teste chaque caractéristique afin de voir si elle bouge…vers le haut…comme vers le bas 😂

Conclusion :

J’adore 😍😍😍… C’est beau, c’est développé au minimum niveau background, mais suffisamment évocateur pour mettre des idées plein la tête (idéal pour les mj qui comme moi n’ont plus le temps de se manger des pavés, mais suffisamment de bouteille pour broder leur propre canevas sur un modèle simple). On a là une fantasy désespérée au possible pour coller au Doom Métal dont le jeu se revendique et tous les moyens de la mettre en scène.
Déchéance du monde, déchéance de la morale, déchéance des personnages (vu le système, ça paraît assez clair comme direction), bref déchéance quoi 😁.
À ça, on peut ajouter que les auteurs et l’éditeur (Fria Ligan) ont l’air plutôt souples sur l’exploitation de la licence vu la quantité de projets déjà sortis autour du jeu, projets comptant une campagne officielle, mais également une bande son en cours de production (la pochette du 33 tours fera office d’écran et un livret de background proposera des aventures pour coller à la musique), des fanzines compatibles, plusieurs livrets de contexte, et j’en passe.
Mais où est le piège me direz vous… ?
Ben… ce n’est pas dispo en vf pour l’instant (mais à mon humble avis, c’est une situation qui ne durera pas, devant l’engouement général autour de ce jeu) et avouons le, le parti pris esthétique et ambiant du jeu ne plaira pas à tout le monde.
Ceci étant dit, c’est d’un accès facile et se lit en une bonne heure si vous ramez en anglais, un peu moins dans le cas où vous seriez à l’aise avec la langue de Shakespeare.
Bref, foncez… Achetez le, lisez le, jouez-y et Rock’n Roll 🤘🤘🤘

28€ et des poussières sur la boutique de Fria Ligan³ (bon, plus le port 😅)

Ressources et notes :

¹Old School Renaissance mouvance de JDR dit « à l’ancienne », vous pouvez consulter le Principia Apocrypha, manuel explicatif fort sympathique en téléchargement libre pour en savoir plus. http://www.mediafire.com/file/tkkd7j9b9djjd0v/PrincipiaApocrypha_VF1_0.pdf/file

²Magie Vancienne : un classique de Donjons et Dragons, hérité du Cycle de la Terre Mourante de Jack Vance, dans lequel les magiciens mémorisent un certain nombre de sortilèges de leurs grimoires quotidiennement et les « oublient » une fois utilisés, devant ainsi recommencer le lendemain…

³Fria Ligan : éditeur suédois en pleine ascension proposant toute une variété de jeux de rôles et notemment connu pour des jeux comme Mutant Year Zéro, Tales from the Loop, Vaesen ou encore Alien

Lien vers la boutique : https://frialigan.se/en/store/